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Freud / Donald Trump et le narcissisme : Une plongée psychanalytique dans le Moi idéal et l’obsession de la glorification

Donald Trump incarne un narcissisme pathologique éclairé par Freud, Lacan et Kernberg : déni de la défaite (2020), tweets auto-glorifiants, gestion du COVID. Son besoin d’admiration, des rallyes cultuels à l’assaut du Capitole, révèle un Moi idéal hypertrophié. #Psychanalyse #Narcissisme #Trump


Donald Trump, président des États-Unis, incarne une figure archétypale du narcissisme contemporain. Son parcours, marqué par des déclarations grandioses, une relation symbiotique avec les médias et un besoin compulsif d’admiration, offre un terrain fertile pour une analyse psychanalytique. En mobilisant les théories de Freud, de ses successeurs (Kohut, Kernberg, Lacan) et des exemples concrets tirés de sa carrière, cet article décrypte les mécanismes d’un narcissisme qui dépasse l’individu pour façonner une ère politique entière.


Freud et le narcissisme primaire/secondaire : Les racines d’un Moi surdimensionné

Pour Freud, le narcissisme est une étape normale du développement, mais il devient pathologique lorsqu’il persiste à l’âge adulte sous forme de narcissisme secondaire, où le sujet reporte toute sa libido sur lui-même.

Exemples Trumpiens :

  • « Je suis l’élu » : Lors de sa campagne de 2016, Trump a déclaré : « Je suis le seul qui puisse résoudre ce problème », fusionnant son ego avec une mission messianique.
  • Dénégation des échecs : Après sa défaite de 2020, il a insisté : « J’ai gagné cette élection, et de loin », niant la réalité pour préserver son image de vainqueur.

Freud explique que le Moi idéal (une version fantasmée de soi) remplace l’idéal du Moi (les normes sociales internalisées) chez le narcissique. Trump illustre ce remplacement par son autobiographie « Trump : The Art of the Deal » (1987), où il se décrit comme un génie incontesté, bien avant son entrée en politique.


Post-Freudiens : Fragmentation du Self et mécanismes de défense

Heinz Kohut et la peur de l’effondrement

Kohut théorise que le narcissisme pathologique naît d’un Self fragile, compensé par des fantasmes de grandeur. Chez Trump, cette fragilité transparaît dans ses réactions aux critiques :

  • Attaques contre les juges et procureurs : Lors de ses procès pour fraude financière (2023-2024), il a qualifié les procureurs de « fous » et de « racistes », rejetant toute faute.
  • Crises sur Truth Social : Sur son réseau social, il compare régulièrement ses ennuis juridiques à une « persécution politique », transformant les échecs en preuves de sa grandeur persécutée.

Otto Kernberg et le narcissisme malin

Kernberg décrit un narcissisme teinté de psychopathie : manipulation, absence d’empathie et mégalomanie. Trump incarne ce profil :

  • Gestion de la pandémie : En 2020, il a minimisé le COVID-19 (« Cela disparaîtra comme un miracle »), tout en se vantant de « sauver des millions de vies ».
  • Attaques personnelles : Il a ridiculisé une journaliste handicapée (Serge Kovaleski, 2015) et traité ses rivales politiques de « femmes laides » (Elizabeth Warren, Hillary Clinton).

Lacan et le stade du miroir inversé

Pour Lacan, le sujet se construit via l’image renvoyée par l’Autre. Trump pousse ce mécanisme à l’extrême :

  • Obsession des sondages : Même perdant, il cite des sondages « alternatifs » le déclarant vainqueur.
  • Manipulation de l’image : En 2019, il a modifié une carte météo avec un marqueur pour étendre la trajectoire d’un ouragan vers l’Alabama, refusant d’admettre son erreur.

L’image publique comme « narcissistic supply » : La machine à glorification

Le terme narcissistic supply (approvisionnement narcissique), popularisé par la psychanalyste Alice Miller, désigne l’attention—positive ou négative—dont se nourrit le narcissique.

The Apprentice : Naissance d’un mythe

Dans l’émission The Apprentice (2004-2015), Trump a incarné un patron tout-puissant, scénarisant son propre mythe. La phrase « You’re fired ! » est devenue un symbole de son autorité impitoyable, consolidant son image de winner.

Twitter : L’arme de validation massive

  • Auto-glorification : « J’ai accompli plus en 3 ans qu’aucun président dans l’histoire ! » (Tweet du 4 juillet 2020).
  • Dénigrement des rivaux : En 2024, il a qualifié Ron DeSantis de « désastre total » après que ce dernier ait annoncé sa candidature.

Les rallyes : Des rituels d’adoration

Ses meetings politiques ressemblent à des cultes de la personnalité :

  • Chants de « Lock Her Up ! » (2016) contre Hillary Clinton.
  • Adulation de la foule : Il interrompt souvent ses discours pour savourer les ovations, comme lors d’un rallye en Ohio (2022) où il reste silencieux pendant près de 3 minutes, souriant face aux acclamations.

Conséquences sociétales : Quand le narcissisme devient politique

Fusion entre l’ego et la nation

Le slogan « Make America Great Again » (MAGA) n’est pas qu’un programme politique : c’est une projection de sa propre quête de grandeur. Lors de son discours d’investiture (2017), il a décrit les États-Unis comme un pays « en ruines » qu’il sauverait seul, miroir de sa vision héroïque de lui-même.

Polarisation et « réalité alternative »

Son refus de reconnaître sa défaite de 2020 a alimenté le mythe du « Big Lie », menant à l’assaut du Capitole le 6 janvier 2021. Cette crise révèle un narcissisme collectif, où ses partisans adoptent ses distorsions pour maintenir l’illusion de sa perfection.

L’héritage culturel : Le narcissisme comme modèle

Trump a normalisé des comportements autrefois tabous :

  • Attaques contre les institutions : Il a traité la Cour suprême de « illégitime » lorsqu’elle statuait contre lui.
  • Célébration de l’égoïsme : « Les losers pleurent, les winners vont de l’avant » (discours de 2018).

Perspectives psychanalytiques : Peut-on guérir un narcissique ?

Les psychanalystes sont pessimistes : le narcissisme pathologique résiste souvent à la thérapie, car le sujet nie tout problème. Trump lui-même a déclaré à Bob Woodward : « Je n’ai jamais eu besoin de m’excuser » (2020).

Pourtant, certains voient dans son obsession du père (Fred Trump) une clé. Dans « Too Much and Never Enough » (2020), sa nièce Mary Trump décrit un enfant humilié par un père exigeant, ce qui aurait alimenté sa quête de reconnaissance.


Le narcissisme à l’ère de l’hypervisibilité

Donald Trump incarne une pathologie individuelle devenue force politique. Son besoin de glorification, ses mécanismes de défense (dénégation, projection) et sa relation fusionnelle avec l’image publique reflètent une société où le narcissisme est récompensé par l’attention médiatique.

En écho à Lacan, Trump montre que « le moi est un autre » : un reflet déformé, alimenté par les réseaux sociaux et une base adoratrice. Si Freud nous avertissait des dangers du Moi idéal, l’ère Trumpienne rappelle que lorsque le narcissisme s’empare du pouvoir, c’est la réalité elle-même qui risque de se dissoudre.


Références clés :

  • Freud, Pour introduire le narcissisme (1914).
  • Kernberg, Borderline Conditions and Pathological Narcissism (1975).
  • Mary Trump, Too Much and Never Enough (2020).

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